Pas de

Pas de "nettoyage" à la Halle Puget!

04-06-2020

Depuis une semaine, la Police a recommencé à harceler les personnes qui s'y abritent la nuit pour qu'elles en partent. Comme cela s'était déjà produit, leurs affaires sont prises et jetées, y compris les papiers (en règle) d'une personne au moins. La Préfecture a visiblement accédé à la demande de la mairie pour faire « le grand nettoyage » ; sauf qu'il s'agit d'êtres humains que les pouvoirs publics auraient dû mettre à l'abri car nous sommes en urgence sanitaire, le Code de l'action sociale et des famille (art. 345) a fait de l'hébergement un droit inconditionnel, et beaucoup sont des personnes en demande d'asile, l'Etat ayant l'obligation de les accueillir dignement. 

Pas de "nettoyage" à la Halle Puget!
Non content de ne pas avoir mis à l'abri et protégé les personnes migrantes installées sous la Halle Puget, à la Porte d'Aix et autour de la gare Saint Charles pendant le confinement, l'État et ses services les persécutent désormais depuis le déconfinement.

Dès la mi-mars, de concert avec de nombreux autres quartiers de Marseille, nous sommes plusieurs à nous être unis pour mettre en place des maraudes quotidiennes dans le quartier Belsunce (Halle Puget, Porte d'Aix, secteur Saint Charles). Dans ce cadre, nous avons distribué chaque jour entre 70 et 130 repas chauds, du café, du thé, mais aussi des masques, du savon, des mouchoirs, de l'eau, des duvets, des matelas, des kits hygiène, des téléphones, des vêtements aux personnes qui, pendant cette période où chacun était censé "rester chez soi", n'ont pas eu d'autre choix que de vivre à la rue alors que tous les services publics, associations étaient fermé.e.s ou avaient cessé leurs  activités.

Ces maraudes ont été rendues possibles par la mobilisation de celles et ceux qui étaient préoccupé.e.s par le sort des personnes qui, à Marseille, ne pouvaient bénéficier d'un toit pendant cette période. Les personnes à la rue n'avaient plus accès ni à la nourriture ni à des douches. Nous avons pris le temps de rassembler des denrées alimentaires, de les cuisiner et de les distribuer, de collecter des dons, de recevoir des aides pour ces achats et de recenser chacun.e ayant besoin d'aide pour faire une mise en relation avec le 115: à ce jour, plus de 400 personnes ont été recensées sur le seul centre-ville alors qu'une quarantaine seulement ont été mises à l'abri.

Ces maraudes ont permis la naissance de nouvelles solidarités, entre nous, avec les migrants et les personnes à la rue, avec les associations locales. De ces nouveaux liens est née l'envie de continuer à soutenir les personnes migrantes dans leurs démarches pour de meilleures conditions de vie.

Dans ce contexte, nous sommes choqués et en colère de constater que, depuis plusieurs jours, au petit matin et le soir tard, des groupes de policiers (pas toujours munis de masques de protection) débarquent à la Halle Puget et dans les alentours pour nettoyer et jeter, de manière systématique, les maigres affaires de ces personnes et procéder à des arrestations. Pendant la période du confinement, nous avons eu l'impression de nous substituer à des autorités défaillantes. Aussi nous trouvons particulièrement scandaleux et indécent le fait que, dans l'après confinement, la première intervention visible de ces pouvoirs publics prenne la forme d'interventions musclées des forces de l'ordre, d'autant qu'elles viennent casser la relation d'aide et de confiance que nous avions commencé à tisser avec les personnes à la rue.
Nous tenons à rappeler que la plupart des personnes installées ou fréquentant la Halle Puget et les alentours sont des demandeurs d'asile et/ou des personnes en grande vulnérabilité, incluant des personnes âgées, des femmes enceintes et/ou avec de jeunes enfants, ou encore des personnes ayant des problèmes de santé, c'est-à-dire des personnes envers lesquelles l'État a une responsabilité d'accueil et de protection, et pour lesquelles il devrait fournir le minimum vital afin qu'elles soient logées dans des conditions décentes, comme l'exige la loi.

C'est donc avec écoeurement que nous constatons que les affaires de ces personnes sont systématiquement jetées. Les matelas, couvertures, kits d'hygiène, vêtements, téléphones que nous  avons pu distribuer grâce à la solidarité marseillaise et associative, et parfois aussi, leurs sacs personnels et leurs documents d'identité, sont éliminé.e.s.
L'action d'humanité effectuée au quotidien est bloquée par l'acharnement indécent des autorités qui, jusqu'à présent, ont surtout fait preuve de défaillance.

Nous, Maraude Belsunce, Coup de pouce aux migrants, Réseau Hospitalité, la Cimade, Project13asso, les cuistots michtos de Manifesten et El Manba, mais aussi celles et ceux qui nous ont ouverts leurs cuisines collectives dans les quartiers du centre-ville et dans les quartiers Nords, refusons d'être les témoins passifs d'une politique publique de persécution, qui vise à repousser hors du centre ville ses habitants précaires. Nous appelons de nos voeux à la mise en place d'une véritable politique d'accueil et d'accompagnement des personnes en exil, dont chacun des parcours témoigne de la capacité à se battre au péril de leur vie pour le droit à une meilleure existence.
Il est déjà difficile de constater l'incapacité des pouvoirs publics à prendre leur responsabilité et à mettre en place une politique d'accueil sincère des personnes migrantes. Mais il est carrément insupportable de les voir saper notre effort collectif et la responsabilité que nous, habitant.e.s et associations, prenons à leur place.

Nous alertons, haut et fort, sur cet acharnement qui se produit tous les jours depuis le mercredi 20 mai.

Nous refusons que notre démarche d'aide soit mise en péril par des interventions policières dont la présence n'est qu'un indicateur supplémentaire de la déficience des services de l'État et de la municipalité.

Autres Signataires :
RESF13
l'Assemblée de la Plaine
Aouf
Collectif du 5 Novembre-Noailles en colère